Standardisation des méthodes de Management – Entre espoirs et craintes – Réflexions sur le Teslisme
- drgrijalvo
- 17 mars 2022
- 13 min de lecture

Aujourd’hui si nous constatons un certain conformisme et une standardisation croissante des méthodes de management, c’est sans aucun doute en lien avec le développement de puissants réseaux constitués de fondations, d’organismes et d’instituts affiliés, de clubs et autres think-tanks de cabinets conseils et d’écoles de management elles-mêmes engagées dans des courses aux accréditations sous critères américains, n’ayant ainsi de cesse de diffuser une pensée unique qui pèse désormais de plus en plus lourdement sur les esprits et les façons de faire et de diriger.
Car au delà du marché colossal que représente la formation des managers celle-ci est un enjeu stratégique majeur. En effet, former les leaders de demain, et les « joung global leader » c’est aussi et surtout, au travers des hommes et des femmes ainsi formatés pourrions-nous dire, selon les règles générales de l’Ivy League, assurer au travers des réseaux, l’enracinement de la domination mondiale d’une école de pensée et d’un agir conduisant finalement à préserver les mêmes intérêts globaux.
Cependant notre propos ici, n’est pas de condamner l’influence américaine dans les entreprises et les organisations nationales ou internationales, c’est un fait incontestable, comme le soulignait François Mitterrand après ses quatorze années passées à la présidence de l’Etat français « les américains sont voraces et il veulent régner sur le monde sans partage », et notamment sur le monde des idées.
Par ailleurs, le constat de cette volonté d’hégémonie peut également constituer une motivation supplémentaire pour le monde russe, que de rechercher une proposition alternative et une vision de même ampleur, qui serait en quelque sorte, une idée russe du monde économique et industriel qui viendrait ainsi concurrencer celle américaine ou chinoise.
Cependant, si nous comprenons bien l’intérêt des élèves managers à s’inscrire dans ces filières formatées selon l’american management et aujourd’hui considérées comme étant les plus adaptées pour leur permettre d’occuper les meilleurs postes, les plus prestigieux et les mieux rémunérés et ainsi poursuivre à moindre risque leurs propres intérêts, nous pouvons cependant nous poser la question de savoir comment cette standardisation des méthodes de management peut-elle se traduire au sein des organisations et si elles seront à même de répondre aux défis futurs.
En ce qui concerne l’avenir, de façon très générale, il est vraisemblable que l’augmentation de la richesse et de la puissance économique des grandes multinationales que ce soit, dans les secteurs de haute technologie, de la distribution ou encore des sociétés pharmaceutiques, va durablement favoriser la concentration et l’accumulation d’une forte puissance commerciale dans les mains d’une poignée de personnes, ce qui aura inévitablement pour conséquence de pousser vers des regroupements d’activités avec une montée en puissance probable des méga-factory que l on voit déjà s’implanter un peu partout dans le monde.
En effet, pour les acteurs leaders de leur domaine, la grande quantité de capital dont ils disposent leur permettra d’investir les montants faramineux nécessaires à la construction de cesGigafactory, ce qui dès lors, selon cette perspective, constituera pour les concurrents une barrière quasi infranchissable pour entrer sur un marché qui aura la vocation d’être de plus en plus dominé par de très grands groupes.
Ainsi, et par ruissellement, il est probable que les montants colossaux de capitaux ainsi concentrés et disponibles vont massivement s’investir dans la mise en place de nouveaux systèmes de productions, de processus informatiques sophistiqués et de robotisations accrues.
Par ailleurs, à la suite des tendances comptables des années 1990-2000 qui visaient à obtenir une plus grande finesse des centres de coûts afin notamment d’alimenter des comptabilités par activité, recherches qui se sont poursuivies jusqu’à aujourd’hui sous le vocable de « Lean management », il est donc probable qu’un niveau supérieur sera visé afin de limiter plus grandement encore les gaspillages en ayant notamment recours à la digitalisation.
Cela va se traduire par la généralisation et l’installation de capteurs à l’intérieur des usines, dans tous les recoins des ateliers, au coeur de toutes les machines permettant ainsi de récolter toutes les informations de production afin que des logiciels applicatifs puissent les analyser et les traiter.
Cette collecte massive de données associées à la démultiplication de la puissance des ordinateurs ainsi qu’à l’intégration de nouvelles technologies dans les fonctions des entreprises comme la data-science permettront par exemple de réaliser des calculs prédictifs de maintenance ou de mieux gérer les flux en éliminant les attentes et les mouvements de stocks inutiles. Cette captation de données, leur concentration et leur analyse viseront ainsi à produire une visualisation en temps réel de l’état global du parc industriel et de sa production.
Cette introduction massive de la digitalisation, malgré sa grande complexité, ses coûts exorbitants d’installation, de mise à jour et de maintenance est aujourd’hui déjà considérée comme étant la solution pour atteindre une plus grande performance et une meilleure productivité, il est donc probable que cette tendance étant massivement préconisée elle sera encore renforcée à l’avenir.
En conséquence, il s’agira d’arriver à un asservissement des processus aux données qui seront ainsi récoltées en temps réel, c’est en quelque sorte la réalisation de la boucle action-rétro-action avec le contrôle par le feed- back et l’avènement des théories des systèmes et de la cybernétique qui ont été développés aux états unis durant les années 1950 à 1970, et lentement qui ont ainsi trouvé leur application au travers du management des systèmes d’information et de la mise en place de logiciels de production de plus en plus complexes pour finalement arriver à cette étape achevée de réalisation, constituée par cette hybridation du digital et de l’industriel et de ce que l’on commence à définir comme l’hyper-manufacturing.
Bien évidemment les services non directement productifs ainsi que les entreprises de services, ne seront pas délaissés par ces processus de collecte de données, cette recherche de traçabilité et au final d’asservissement des métiers.
Il en sera de même dans les services publics, en effet, dans la lignée des méthodes du « New public management » consistant à appliquer aux services publics les mêmes méthodes que dans l’industrie, il est probable que dans la même recherche de rentabilité à court terme, la traque des données en vue de leur analyse se développera également massivement dans les administrations d’Etat.
C’est d’ailleurs, ce que nous pouvons déjà constater par exemple en France, dans le domaine de santé, où les personnels médecins, soignants sont déjà assujettis à des processus informatiques qui doivent être alimentés en permanence, à chaque acte de soins, pour obtenir cette traçabilité et ainsi arriver à une comptabilité analytique et de tarification à l’activité.
Ainsi, de façon globale que ce soit, les opérateurs, les techniciens ou les agents de services tout autant que les agents de santé, les médecins ou que les chercheurs et les enseignants formateurs, c’est a dire toute personne humaine au sein des organisations dans le secteur privé industriel ou des services tout autant que dans l’administration publique, sera ainsi de plus en plus sollicitée pour produire des données afin d’alimenter constamment le processus et les machines asservies à différentes fonctions.
Aujourd’hui il s’agit d’automatisation et de robotisation, de connectivité, de temps réel, demain il s’agira de l’internet des objets, de data-science et d’Intelligence Artificielle, autant de technologies qui par leur application sont considérées comme étant susceptibles d’améliorer la performance opérationnelle.
Le risque étant qu’à force de se mettre au service des machines et de les alimenter en données, les humains finissent par ressembler aux machines qu’ils ont créés, dès cet instant, ils seront alors pour une partie de plus en plus grande, remplaçable par elles.
Est-ce le but final ?Car toutes ces méthodes ont depuis été longtemps abandonnées en raison des dégâts qu’elles pouvaient produire sur la performance globale, l’avons nous oublié ?
Cependant, il n’est pas inutile de rappeler qu’au-delà des termes sexy et des anglicismes soft, du point de vue de l’idéologie sous-jacente, ces méthodes ne sont rien d’autres que la remise au goût du jour, du taylorisme et d’une certaine idéologie de la rationalité, sous tendue par un fort déterminisme technologique, qui fait du changement technique, le principal moteur du changement et le premier élément de gains de productivité.
C’est en quelque sorte le retour de la vision de l’ingénieur du début du 20ième siècle, une vision essentiellement techniciste affublée d’une couchede cybernétiqueavec en point d’horizon, la promesse ultime d’une usine sans humains, une usine 4.0, entièrement connectée, avec une gouvernance automatisée des processus, pilotée par l’IA, consacrant finalement les facteurs travail et capital en l’absence totale de facteurs humains.
Cependant, nous savons comment cette histoire se déroule, les managers tenteront de faire coopérer les employés pour aider les ingénieurs à installer divers capteurs et indicateurs connectés aux centres de données, sollicitant l’enthousiasme par la nouveauté de la technologie et la motivation pour le projet Factory 4.0, incitant ainsi les ouvriers à mettre en œuvre eux-mêmes les moyens de leur propre asservissement, ce qui contribuera progressivement à les priver de toute compétence réelle, ainsi au fil du temps, une fois l'enthousiasme initial passé, tous les problèmes classiques des difficultés managériales remonteront à la surface ce qui dégradera fortement le gain de performance espéré.
En effet, réduire les employés à des opérateurs c’est, pour des populations humaines, consacrer irrémédiablement leur démotivation et par conséquence devoir à terme faire face aux conséquences du désinvestissement programmé des ouvriers.
Mais pas seulement, car en éloignant l’intelligence de l’ouvrier de la production de valeur, en réduisant l’humain au rôle d’opérateur, c’est également le technicien qui ne deviendra plus que l’interface de la machine, de même que l’ingénieur qui se retrouvera au service du concepteur de cette même machine, et finalement l’on assistera tout autant à une forme de dématérialisation de la production de valeur qu’à un profond rejet pour ce type d’organisations.
Quand au rôle du manager dans ce type de structure, il est tout a fait possible qu’il puisse comprendre sa mission comme étant le garant de la norme et du standard édicté par l’ingénierie, en quelque sorte comme une simple interface des dispositifs techniques et productifs, pour finalement se retrouver lui aussi, de plus en plus déconnecté de l’organisation humaine et du travail lui-même.
Nous connaissons la puissance de la fascination exercée par les machines sur leurs concepteurs, nous connaissons pareillement les effets de ce techno-centrisme, et nous pouvons aisément imaginer ce que peuvent donner au sein des organisations humaines ces tentatives de rationalisation extrême.
Nous avons encore à l’esprit les images de Charlie Chaplin, du Charlot des temps modernes, de cet humain devenant une machine et nous connaissons les effets, du taylorisme, et les raisons de son échec, ainsi un néo-taylorisme même augmenté d’IA, n’échappera pas aux mêmes conséquences.
De tout temps, l'approche industrielle taylorienne qui met systématiquement de côté les relations humaines tout autant qu’elle simplifie très grossièrement les dimensions des hommes, à ce que l’on appelait autrefois la « force de travail », négligeant ainsi tous les autres aspects de l’individu au travail ne peut espérer se développer à long terme, car elle engendre les mêmes conséquences, perte de sens, ennui, démotivation, absentéisme, turn-over qui vont ainsi miner de l’intérieur les efforts réalisés pour obtenir une meilleure performance.
En effet, comme Blaise Pascal, le célèbre philosophe et mathématicien français l’écrivait dans les Pensées en 1670, « Tous les hommes recherchent d'être heureux : cela est sans exception. Quelques différents moyens qu'ils y emploient, ils tendent tous à ce but. ,.. C'est le motif de toutes les actions de tous les hommes, jusqu'à ceux qui vont se pendre",
Vouloir ignorer que le travail occupe une place essentielle dans l'existence des individus qu’il structure non seulement notre rapport au monde, mais aussi nos rapports sociaux et qu’en conséquence, le fait de s'y sentir heureux ou malheureux a des répercussions importantes et immédiates sur la vie des salariés tant privée que sociale conduit aux mêmes erreurs.
Ainsi, qui voudra travailler dans ces Gigafactory ? Et l’on voit déjà se profiler la perte d’attractivité de ces usines notamment en Europe, difficultés de recrutement, conditions de travail jugées hostiles, perte du sens du travail.
D’ailleurs, apparaissent déjà autour de ces organisations, toutes sortes de compensations sociales, ces services de conciergerie, de garderie, ces lignes d’appels gratuits pour des consultations psychologiques en ligne, ces ateliers de pleine conscience et ces cellules de préventions suicides qui sont déjà présentes pour tenter de minimiser les contraintes et redonner un peu d’attractivité aux emplois.
La proximité sympathique des dirigeants, leur accessibilité, le fait de pouvoir rencontrer Elon MUSK dans le hall de son usine, éventuellement lui serrer la main et lui glisser un mot sur l’amélioration d’un process, ou encore le fait de travailler de façon acharnée à l’accélération de la transition énergétique afin de sauver la planète ou tout faire, pour que l’entreprise puisse rapidement implanter une nouvelle usine sur Mars, seront-ils des éléments suffisants susceptibles de motiver les troupes d’opérateurs ? Rien n‘est moins certain.
Il est probable, comme le fordisme et le toyotisme après lui, la recherche d'une productivité maximale rendue possible par la numérisation, l'automatisation et à plus long terme, l'intelligence artificielle, va aller vers des difficultés croissantes et nécessitera une révision majeure, du moins du point de vue organisationnel et managérial.
Avec déjà en premier constat, énoncé par le manager de Tesla lui-même qui reconnaît avoir trop fait confiance aux robots et «sous-estimé les humains» ce premier indice, est également renforcé par les méthodes de management proposées qui, au-delà des aspects d’une communication qui se veut jeune et dynamique, sont bien en retrait de celles, par exemple mises en place par le Toyota qui permettaient par exemple aux ouvriers de déterminer les standards de production ou de modifier les modes opératoires ; Quant à la lecture du guide d’accueil du salarié Tesla, elle est consternante.
Ce nouveau Taylorisme qui semble se propager, avec d’un côté des ingénieurs fascinés par leurs propres créations et de l’autre, des managers qui tendent à suivre le conformisme intellectuel d’un néo-taylorisme idéologique teinté de « cool management » est particulièrement inquiétant.
Le but espéré, est-il que les opérateurs du 21ième siècle, comme leurs prédécesseurs du 19ième, ainsi plongés dans la tourmente des temps post-modernes, trouvent en ces centres manufacturiers, l’unique possibilité d’un travail, d’une existence et d’une intégration sociale, espérant ainsi donner par leur sacrifice la possibilité à leurs enfants de s’émanciper et ainsi échapper à leurs conditions.
A moins que les humains étant désormais naturellement considérés par les managers comme moins dociles et moins intelligents que les machines, les ingénieurs ont-ils reçu pour mission de compenser cela, par exemple en implantant une puce neuronale afin d’obtenir ainsi une meilleure communication homme-machine, est-ce cela l’objectif du projet Neuralink d’Elon MUSK ? Opérer une plus grande fusion des humains et des robots ; Des cyborgs seront-ils, les nouveaux opérateurs des gigafactory ?
Cette vision techniciste nous semble inquiétante en effet, mais également paradoxale, car il y a d’une part, des efforts extrêmement importants qui sont déployés pour mettre en place au sein des organisations, une surveillance de plus en plus complexe avec la conviction intime, d’un idéal de l’usine sans humains, utilisant pour cela des outils opérant des transformations parfois radicales, visant à réduire toujours davantage les individus à de simples exécutants et d’autre part, l’on parle de motivation, souhaitant ainsi solliciter de ces mêmes personnels, inventivité et créativité
Ainsi, les décideurs construisent une structure, qui vise à transformer les employés en opérateurs connectés et asservis à des machines, les ingénieurs réduisent drastiquement les marges de manœuvres opérationnelles, voulant à tout prix, faire reculer la susceptibilité et la psychologie humaine, et dans le même temps les managers veulent néanmoins pouvoir compter sur ces opérateurs pour piloter comme une start-up cette structure, devenue entre temps une Méga-structure, car les robots compte tenu de l’imperfection de leurs créateurs, sont également devenus des êtres susceptibles qui demandent désormais pour fonctionner une cohorte de programmeurs, de techniciens de maintenance ou autre agents en cyber-sécurité nouvellement employés.
Il y a donc une standardisation massive des processus et des méthodes à tous les niveaux de l'organisation, ce qui rend l'organisation plus rigide et dans le même temps une forte demande de flexibilité et de production à la demande, étant donné que la vitesse de résolution des problèmes est cruciale dans ces contextes agiles, le niveau à atteindre dans l'automatisation est donc extrêmement important, coûteux en terme d'investissements et en moyens de maintenance opérationnelle avec au final une démotivation probable des opérateurs.
Le toyotisme, a mis quelques années à s’effondrer en tant que modèle de Management, en effet combien de combats pour que l’entreprise renonce à un sous effectif structurel, développe des formations, accorde la stabilité de l’emploi, paye les heures supplémentaires, des années de lutte pour un meilleur partage des gains, et au final l’élan initial s’est épuisé, absorbé par les freins utilisés par les employés pour amoindrir leur participation pleine et entière et réduire de fait l’innovation et la performance globale, consacrant ainsi l’échec de la révolution du bonheur par le travail initiée seulement quelques années plus tôt.
Du point de vue "micro", du management opérationnel, il y a une certitude , qui est celle que de placer au premier plan la technologie, le process, la standardisation, les méthodes de l’ingénierie et une supposée rationalité objective pour ensuite se poser dans un deuxième temps, la question du comment convaincre ou de faire adhérer, a historiquement toujours conduit à un échec, à plus ou moins long terme, selon le contexte culturel.
Des innovations faussement nouvelles, plaquées sur des procédés anciens, issues de philosophies archaïques et essoufflées ne peuvent constituer un modèle de Management novateur et enrichissant.
La motivation, c’est a dire en quoi cette amélioration du process a du sens pour l’employé qui est impliqué dans ce processus doit rester la première préoccupation du manager.
En cela, la meilleure automatisation, restera toujours celle qui sera considérée comme une aide pour le conducteur de la machine, une assistance au pilotage procurant un enrichissement des tâches et non pas ressentie par l'employé comme une contrainte ou un élément pouvant se substituer à lui, dans la perspective d’une conduite autonome, pilotée par un robot ou une IA.
Enfin du point ce vue "macro", c’est a dire de la stratégie, il est une évidence que si l’on recherche la flexibilité, il peut être intéressant de se poser la question, de l’intérêt de garder une linéarité des process et des chaînes de production en ligne, qui sont d'une grande lourdeur conceptuelle et qui correspondent de moins en moins à la prise en compte des cycles produits et des attentes de consommation.
Ainsi, pour atteindre l’excellence et la performance industrielle, il y a sans aucun doute d’autres pistes sérieuses qui ne consistent pas obligatoirement à fabriquer une usine dans l’usine, une usine digitale superposée à l’atelier industriel, mais à inventer grâce à l’ingéniosité des employés des formes de productions plus intéressantes, pour tous, et pas seulement pour l’ingénieur ou le manager.
Désormais, les défis de la flexibilité et de la rapidité sont nombreux, ceux de la qualité également, à chaque culture émerge une contre culture, à la production de masse vient s’opposer l’atelier artisanal connecté et l’abandon de l’obsolescence programmée, au commerce mondial et aux délocalisations, les circuits courts et les relocalisations.
Ainsi, pourquoi ne pas s'inspirer, compte tenu de la technologie actuelle, de l'usine suédoise Volvo de Kalmar, qui a proposé durant plus de 20 ans de 1970 à 1990 un modèle de gestion innovant dans l'industrie automobile, avec la création d'équipes autonomes, d' ateliers flexibles, de gestion de la production plus souple et localisée, pourquoi ne pas utiliser de petits dispositifs auxiliaires intelligents d'IA ergonomiques et facilement contrôlables au niveau de l'opérateur, pourquoi ne pas ouvrir chaque atelier , chaque machine et son pilote, chaque service sur le monde extérieur ?
Il y a ainsi, contrairement à ce que l’on peut immédiatement penser une hétérogénéité au niveau mondial de la production des biens et services et même au niveau des grands industriels, ainsi l’on rencontre différentes tendances toutes plus ou moins comprises au sein d’un triangle délimité par trois pointes, constituées d’un côté par le système fordien classique pur, avec un néo-taylorisme et de grandes séries, de l’autre côté par un modèle japonais pur, lié au juste-à-temps et à la qualité totale, et enfin par un pôle kalmarien, où pour simplifier les salariés travaillent en équipes autonomes avec une gestion davantage accès sur les relations humaines.
Le point d’équilibre du mélange dépend largement de l’histoire de chaque pays et de chaque culture d’entreprise. En effet, ce qui fait l’efficacité d’une organisation, beaucoup plus que l’application systématique d’une recette universelle, c’est d’abord la cohérence entre l’organisation du travail retenue, la gestion de la relation salariale et les caractéristiques particulières du marché qui est ciblé.
Les situations restent très diverses d’un pays à l’autre, d’une usine à l’autre et d’un secteur à l’autre, industriel ou service, privé ou public, dès lors une vision monolithique du management, nous paraît dans le contexte actuel excessivement dangereuse.
Ce sont là quelques-uns des défis et des problèmes liés aux nouveaux modèles de production développés aux États-Unis que nous avons soulevés dans cette analyse, mais ces craintes peuvent aussi présenter un espoir et de nouvelles opportunités pour ceux qui ont le courage d'explorer de nouvelles voies et ainsi d'éviter les impasses.
C’est pourquoi, l’Académie de la performance s’attache à introduire une pluralité et un esprit critique permettant aux managers en postes ainsi qu’aux étudiants en gestion de développer, au-delà des modes managériales, les meilleures solutions possibles dans la recherche de la performance
Dr C. Grijalvo
Directeur de l’Académie Performance
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